Et si l’effondrement avait déjà eu lieu. L’étrange défaite de nos croyances

Gori R.

Notre sol s’est dérobé, nos fondations s’effondrent, comment alors penser l’avenir ?

Les croyances, les catégories de jugement et les manières de penser le monde et l’humain qui ont fondé et inspiré les sociétés thermo-industrielles se sont effondrées. Nous sommes pris sous les décombres de cet effondrement. Comme en attestent nos malheurs actuels, - pandémie, crise climatique, crises sociale et psychique -, symptôme de notre impréparation culturelle, sociale et civilisationnelle

 

Les croyances, les catégories de jugement et les manières de penser le monde et l’humain qui ont fondé et inspiré les sociétés thermo-industrielles se sont effondrées. Nos malheurs actuels, – pandémie, crise climatique, crises sociales et psychiques –, attestent tels des symptômes de notre impréparation culturelle, sociale et civilisationnelle.

Notre sol s’est dérobé, nos fondations s’effondrent, comment alors penser l’avenir ?

Les lueurs du présent proviennent d’un astre mort, celui des croyances du xixe siècle, obscurcies par les tragédies du siècle suivant. Et pourtant, ces valeurs guident encore nos conduites, orientent nos actions, fabriquent nos visions du monde et nos subjectivités. Nous retrouvons ces illusions zombies dans des discours progressistes qui, au nom de la modernité – sélection, compétition, progrès continu, évolution orientée par une conception linéaire et mécanique du temps… font du futur leur paradis perdu.

Ce déséquilibre majeur, entre la force de nos découvertes et l’indispensable sagesse qu’elles requièrent, nous fait rater depuis un siècle nos rendez-vous avec l’histoire. Un nouveau langage nous manque pour dire un monde aujourd’hui disloqué, chaotique, fait d’une multitude d’événements inattendus.

Or, nous avons plus que jamais besoin de l’histoire, de la philosophie et de la psychanalyse pour nous délivrer de ce passé qui est moins trace qu’actualité d’une histoire méconnue. Il nous faut sans attendre inventer une nouvelle forme d’utopie fabriquée avec l’étoffe de nos rêves, pensée moins comme le projet d’un avenir meilleur sans cesse repoussé aux calendes grecques que comme l’originalité à saisir à tout moment pour inventer un futur inédit.

Roland Gori est psychanalyste, professeur honoraire de psychopathologie à Aix-Marseille-Université et Président de l’Association Appel des Appels. Il a publié une vingtaine d’ouvrages dont, aux éditions Les Liens qui libèrent, La nudité du pouvoir : comprendre le moment Macron, La Dignité de penser, L’Individu ingouvernable, Faut-il renoncer à la liberté pour être heureux ?, Un Monde sans Esprit et La Fabrique des imposteurs.